BRETAGNE
Duché de Bretagne
Il y a une seule occurrence dans le corpus de base aussi nous passerons rapidement au complément. Mais auparavant, rappelons quelques dates de l'histoire du comté de Nantes :
Selon certaines sources, en 1795 le général Charrette signe un traité avec les bleus à La Saunais (« Histoire religieuse, monarchique, militaire et littéraire de la révolution française et de l’empire » par le baron de Lamothe-Langon Tome II 1840 page 330 et « Louis XVII et les faux dauphins » de René le Conte 1924 page 27)
Après vérification, il s’agit en fait d’une déformation du nom du traité signé au château de « La Jaunaye » à saint Sébastien près de Nantes signé le 17 février 1795 par Charrette et Sapinaud pour les blancs et Ruelle pour la Convention. Encore une erreur due à la similitude d'écriture entre le J et le S en écriture ancienne. Nous ne retiendrons donc pas cette occurrence par la suite.
Hypothèse d'affectation : Autres toponymes
COMPLÉMENT
Ce point est trop isolé et trop loin de nos critères de sélection pour être significatif pour notre recherche. Il a simplement été mentionné à cause de sa similitude avec Senay. Voir cependant le n°8 de la Touraine concernant les lieux dénommés "Guerche". La Guerche à Plélo représentant l'avancée maximale des Francs en Bretagne sous Charlemagne et Louis le Pieux entre 799 et 822. Plélo étant un tout petit peu plus à l'ouest que Yffignac. Tout près, une "Motte" bordée par l'Urne sur deux coté est bien tentante pour être retenue comme l'avancée maximale des Francs en pays breton.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Le Frémur Ouest a très bien pu temporairement matérialiser une frontière des marches de Bretagne. Mais on ne peut affirmer grand chose compte tenu de la forme en "SAUL" qui nous fait pencher vers la production de sel. Pourtant les sauneries bretonnes ont de tout temps été cantonnées le long des côtes, ce qui n'est pas le cas de Hénanbihen. Le lieu-dit "la Grande Motte" tout proche, également sur la rive gauche du Frémur donne plus de poids à cette approche. Il pouvait en effet s'agir d'un guet pour le château de Bienassis attesté au XIIème. Le lieudit "les Villes Bayeux" nous ramène également au pays !
Les Templiers se sont installés au XIIème au bord du Frémur et y ont laissé les vestiges d'un donjon.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Il s'agit ici de réelles pierres amphibolithes sonnantes et non de pierre marquant un territoire comme pour le comté de Vendôme. Ceci nous donne l'occasion de parler du château du Guildo (ci-contre) qui fut le siège du comté de Penthièvre, branche cadette du duché. Les Penthièvre furent souvent opposés à leurs voisins, ce qui peut expliquer les nombreuses fortifications dans le région. Eudes Ier de Penthièvre était très proche de Geoffroy II Martel d'Anjou, fut son beau-père et combattit à ses cotés en Normandie. Ceci peut aussi expliquer les sites de la région.
Hypothèse d'affectation : Autres toponymes
La toponymie officielle invoque la présence du Séné purgatif sur la commune. On peut aussi évoquer la production de sel compte tenu des Marais de Séné. D'autres rapprochent le nom de Sine="Seul"... Peut-être mais la forme est proche de Senan du n°1 et si l'on retient l'avance maximale du territoire Franc aux environs de 800 comme raison d'être de Senan, on sait que le pendant de celui-ci était sur le comté de Vannes.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Proche de Fougères, principale forteresse (ci-dessous) de la frontière bretonne avec Nantes, le site était peut être une position avancée vers la frontière pour le petit château de bois du Xème siécle. Sinon ce pouvait être, comme pour le Mans, un poste de contrôle avant l'arrivée en ville sur la route vers Ernée et Mayenne. A noter que, dans son histoire, Fougères a souvent pris le parti du duc de Normandie ou du roi de France avant celui de la Bretagne.
Les Motte médiévales sont nombreuses sur la commune : Motte Jubain à l'entrée du village, Motte Besnard, la Motte Botherel, la Motte Guéret la Motte Malécot, le Mottay. Nous avons ici un site témoin d'une longue saga débutant au VIIème siècle :
Saint Méen né en Grande-Bretagne vers 540, fonda le monastère de Saint-Jean-de-Gaël à l'orée de la forêt de Brocéliande, sur les bords du Meu. Ce monastère accueillit Saint Judicaël roi de Domnonée en 605. C'est ainsi que naquit la seigneurie de Gaël, partie de la Domnonée, royaume à cheval sur la "Bretagne Insulaire (Grande Bretagne)" et la "Petite Bretagne" armoricaine. En 1034, le terme de Domnonée ne désigne plus que le Penthièvre avec Eudes comme comte (voir n°3) et Ralph l’écuyer est seigneur de Monfort-Gaël. Ralph né de mère anglaise est un grand de la cour d'Edouard-le-Confesseur. Il prend rapidement parti pour Guillaume le Conquérant qui le nomme comte d'Est-Anglie. Son fils, Raoul Ier de Gaël (~1040,~1099), seigneur de Montfort-Gaël et comte d'Est-Anglie, perd toutes ses terres anglaises lors de la révolte des comtes. Il se réfugie à Gaël, se bat victorieusement contre Hoël II de Bretagne associé à Guillaume le Conquérant et construit le château de Monfort. Il meurt lors de la première croisade au pied de Jérusalem prête à tomber en 1099. Son petit-fils Olivier construira le château de Montauban en 1157.
Il est donc tout à fait normal que toutes les mottes de la commune de Bédée correspondent à ces tensions entre Raoul de Gaël (d'origine Danoise) et Hoël de Bretagne et que le puits qui sonne soit ainsi nommé en raison de son emplacement sur la frontière entre les deux domaines. Sonne avait alors le sens nordique de "sone" ceinture, zone, frontière comme dans le Vendômois n°4 et 5 ou Anjou n°2.
Tout ce territoire autour de la forêt du Pertre, Bréal, Mondevert et le Pertre ont de tout temps été disputés entre la maison de Laval et celle de Vitré à tel point que l'on parle là d'une co-seigneurie ayant donné lieu à des procès retentissants. Nous avons vu pour le Maine l'avancée des Laval sur la Gravelle toute proche (voir Maine n°9). Le site peut être rattaché au château de Montjean appartenant aux Laval.
Nous quittons les querelles des Laval et des Vitré puisque Domalain appartenait à la châtellenie du Désert, mitoyenne de celle de Vitré, avec pour château principal le manoir de la Rivière du Désert (disparu). Cette châtellenie dépendait à l'origine de la famille des Châteaubriant et était traditionnellement remise aux puînés de la famille. Qui dit Châteaubriant dit comté de Nantes, et, comme par hasard, notre Saunerie est exactement à la hauteur de la frontière Maine-Anjou, mais à l'intérieur de la partie bretonne. Il y a donc tout lieu de croire que les Angevins, en devenant comtes de Nantes au Xème siècle, ont arrondi quelque peu leurs frontières en rognant le comté de Rennes sur des terres dépendant de seigneurs nantais. C'est ce que vont nous confirmer les sites suivants.
Au passage, saluons le village d'Arbrissel mitoyen de la châtellenie où est né Robert fondateur de Fontevraud, l'abbaye des Plantagenets.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne; Verdun
Entendons sous ce vocable la route partant de Janzé (à 3 km.) et menant au n°a ci-dessous (encore 3 km.). La frontière devait d'ailleurs être le long de cette route rectiligne. L'église Saint Martin de Janzé était une dépendance de l'abbaye de Marmoutier à Tours. Notons qu'une donation à une abbaye importante sur des terres à défricher était un moyen d'étendre son influence et par suite son territoire puisque le seigneur devait défendre ses moines contre les velléités des voisins. Nous sommes toujours dans la châtellenie du Désert et la remarque du n°8 s'applique aussi ici.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Pour apprécier la dénomination, il faut lever un malentendu lié à la ville de Sel de Bretagne toute proche et que l'on retrouve dans le radical Sauln. Le Sel de Bretagne s'appelle ainsi pour provenir de son ancienne dénomination Parochia de Sello - soit - Mais Sello n'a jamais voulu dire Sel (en latin Salis). En Breton c'est le verbe regarder au futur: il regardera. Mais on ne voit pas ce que cela viendrait faire ici. En tapant Sello sur le DMF 2015 on obtient aucune référence au sel. Je pense plutôt (comme en espagnol) au Sceau : Paroisse reconnue par lettre scellée. Et comme le sel diffuse facilement, notre Saunière est devenu Saulnière comme beaucoup d'autres d'ailleurs. L'église de Saulnières est dédiée à Saint Martin de Tours, comme celle de Sel de Bretagne et autrefois celle de Janzé, quelle insistance ! L'argument principal reste toutefois la continuité des possessions des Châteaubriant en Ile-et-Vilaine (ci-contre).
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
La forme Senac est un peu éloignée de nos recherches. Cependant le site est proche de Pipriac qui était une grande paroisse au IXème siècle. Un lieu-dit "le Châtel" montre qu'elle devait être fortifiée. Pipriac était sur la voie romaine d'Angers à Carhaix, chef lieu de Cornouaille. Le site est également proche de Guipry-Messac, là ou la voie romaine passait à gué la Vilaine. Ce gué servait de frontière et était protégé par une motte de chaque coté du fleuve, motte "Raulin" en rive gauche et motte "Baron" en rive droite sur deux hauteurs entre lesquelles se faufile la Vilaine, toutes proches de notre site. La bataille de Messac en 843 vit s'affronter les forces de Renaud d'Herbauge comte de Nantes à une coalition entre Nominoë, Lambert II de Nantes et les Vikings d'Hasting. Renaud fut vainqueur ce jour là mais, ses ennemis s'étant ressaisis, perd la bataille de Blain en 843. Puis Ballon en 845 ; en attendant Jengland (851) que nous allons étudier au n° suivant.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Manifestement un poste avancé du Grand-Fougeray pour surveiller Langon du coté breton de la Vilaine. La Saunerie est exactement sur la frontière actuelle du département 44 à l'embouchure de la Chère et de la Vilaine. On hésite entre deux lieux pour la bataille de Jengland en 851 où les Saxons étaient en première ligne mais n'ont pas brillé par leur courage. Le premier de ces lieux est le Grand Fougeray, une forteresse importante des Châteaubriant qui, du temps de Briant Ier dépendait du comté de Rennes, mais ce n'était pas encore le cas en 851 avec l'existence de la marche de Bretagne carolingienne. Le second lieu est précisément celui du n°e que nous verrons plus loin. La bataille a donc surement eu lieu simultanément aux deux endroits séparés de seulement 5 km.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
L'histoire de Redon commence en 832 avec l'installation par saint Conwoïon de l'abbaye Saint Sauveur directement prise en protection en 834 par Nominoë alors comte de Vannes nommé par Louis Ier le Pieux. L'affectation de cette butte à la défense nord de l'abbaye est confortée par l'existence du lieu-dit tout proche "la Coulée des Moines". Suite aux attaques vikings, l'abbaye doit se replier à Maxent près de Rennes sous la protection de Salomon en 860 et ce jusqu'au début du XIème siècle. Le site a donc probablement été opérationnel entre 834 et 860.
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Sur la rive gauche de la Vilaine, de tous temps frontière naturelle entre Vannes et Nantes, La Saunerie peut être vue comme un poste avancé pour le Château Saint-Clair 44590 Derval ou celui du Grand-Fougeray où eut lieu la Bataille de Jengland en 851. La bataille de Jengland opposa Charles le Chauve, assisté d'un fort contingent de Saxons (venus de Saxe et non de Bayeux) estimé entre 300 et 500 hommes exposés aux avant postes, à Erispoë roi des Bretons succédant à son père Nominoë. Un lieu représentatif des tactiques saxonnes venant conforter les fondements de notre étude (voir aussi n°c).
Carte; Hypothèse d'affectation : Marche bretonne
Dans le Morbihan les grées sont des collines de pierres sur lesquelles se développe la lande. Il faut ici prendre le mot Son dans son sens de sommet ce qui fait que cette dénomination est ancienne. C'est effectivement le sommet d'une colline assez plate avec un lieu dit "Belle Vue" impliquant un paysage dégagé sur les marais alentour et la vallée de la Vilaine. De là on pouvait surveiller le château de Rieux et le pont (comme ci dessous) sur la Vilaine au sud de Redon. Le château de Rieux était la résidence d'Alain le Grand roi de Bretagne puis de Rudalt de Vannes pendant précisément que Foulques Ier était comte de Nantes, c'est dire l'importance stratégique exceptionnelle de cet emplacement. Le Son des Grées était donc un poste avancé du château de la Bretesche (ci-dessous) qui existait au Xème siècle.
On peut à juste titre s'étonner de la rapidité de la mise en oeuvre de cette frontière (moins de deux ans) par les Angevins sur un territoire tout juste et provisoirement acquis. On ne lésinait pas sur les moyens ! A noter également que les angevins, à ce moment en position de force, n'hésitaient pas à mordre sur les anciennes frontières jusqu'aux premières habitations du comté voisin pour maximiser leur territoire.
Voir aussi en Poitou les n° n à r pour la limite sud du comté.
Carte; Hypothèse d'affectation : Foulque Ier
La toponymie du lieu semble indiquer qu'un château préexistant à la Chauvelière à Joué-sur-Erdre était protégé des attaques normandes en aval de l'Erdre par le site de la Saulnerie et en amont par la butte médiévale de "curtis Alientis" au lieu-dit "Allon". L'histoire du site est indissociable de la forteresse d'Ancenis bâtie en 984 par le duc Guérech (981-988) et la duchesse Aremburge d'Ancenis. Ce n'était, à l'époque qu'une motte féodale destinée à garantir la frontière entre les comtés de Nantes, de Rennes et d'Anjou.
à 8 km vers l'est le site complète la ceinture autour d'Ancenis avec la Butte des Gas et (mais peut être plus tardivement) le château de Saint-Mars-la-Jaille dont le nom évoque une marche (marz en breton) entre Anjou et Nantais. Au moins depuis 1015, date de la création du château de Châteaubriant, cette ligne fortifiée a été celle de la frontière nord du comté de Nantes, Châteaubriant étant à ce moment là rattaché au comté de Rennes.
Mésangé est une des plus ancienne seigneurie de Bretagne depuis le XIème siècle. Le site est sur la sortie nord d'Ancenis mais surement trop proche pour être considérée comme un guet. Peut être un poste de garde semblable à celui du Mans (voir Maine n°20)
On peut penser que la Saulnerie rapportait à Port-Saint-Père surement fortifié car c'était un passage stratégique de la rivière Acheneau reliant le lac de Grand-Lieu à la Loire. Le nom a pu être donné pendant l'une des périodes angevines du comté de Nantes. Il était en effet indispensable de contrôler l'accès des navires vikings au lac pour la sécurité de l'abbaye de Saint Philbert de grand Lieu sur l'autre rive du lac.
A noter également que le site est sur la frontière entre la Bretagne et la Francie Occidentale (frontière du traité de Verdun), le pays de Retz ayant été donné par Charles II le Chauve à Nominoë en 846.
Carte; Hypothèse d'affectation : Foulque Ier; Verdun.
Nous voici dans un cas très compliqué mais combien intéressant historiquement parlant ! la Saulnerie est exactement à la croisée des quatre hautes marches communes entre Bretagne et Poitou (croix jaune sur la carte). Les n°12, 13, 14 et 15 correspondent aux communes détenues en commun entre Clisson pour la Bretagne et Tiffauges pour le Poitou. Ces quatre communes sont : 12 Cugand, 13 La Bruffière, 14 Boussay, 15 Gétigné. Dans chaque fief à l'intérieur de ces communes, les droits de justice et les droits de douane sont des cas particuliers ce qui s'applique également à la gabelle. Je ne serais pas étonné que la Saulnerie soit un bureau spécialement chargé de régler les cas particuliers au passage de la Sèvre Nantaise. Voir p 62 de la présente étude pour le guet et la baillée. Le lecteur pressé ira directement à l'épilogue p 209.
Heureusement, il n'y a aucun cas de marge commune entre les trois régions, Bretagne, Anjou et Poitou, ce qui aurait pu se produire à Gétigné ; le casse tête est déjà suffisant comme cela !
Hypothèse d'affectation : Autres toponymes